Le dépistage régulier et la surveillance ciblée des femmes à risque élevé sont cruciaux dans la prévention et la lutte contre le cancer du sein.
Ce qui change en pratique en 2024
À partir du 1er janvier 2024, l’Assurance Maladie invitera les femmes concernées par le dépistage organisé du cancer du sein à effectuer une mammographie de dépistage, entièrement prise en charge.
Les rappels pour le dépistage seront désormais envoyés de manière dématérialisée via le compte ameli. Une première relance sera effectuée 6 mois après la première invitation, suivie d’une deuxième relance 6 mois plus tard si la mammographie n’a pas été réalisée. Pour celles qui n’ont pas de compte ameli, les relances seront envoyées par courrier postal. Contrairement aux invitations, ces relances n’incluront pas d’étiquettes.
Si une patiente a perdu son invitation avec étiquettes, elle peut contacter sa CPAM/CGSS au 36 46 (service gratuit + coût de l’appel) pour recevoir une nouvelle invitation. Bien que les étiquettes ne soient pas obligatoires, elles facilitent l’identification et le suivi des patientes, et les informations peuvent être ajoutées manuellement sur la fiche d’identification si nécessaire.
État des Lieux de l’Épidémiologie du Cancer du Sein
Le cancer du sein est le cancer le plus courant chez les femmes, touchant environ une femme sur huit au cours de sa vie. En 2023, la France a enregistré plus de 61 000 nouveaux cas, ce qui en fait le cancer le plus fréquemment diagnostiqué parmi tous les types de cancers, tant chez les hommes que chez les femmes. Depuis 2010, l’incidence de cette maladie augmente légèrement, de 0,3 % par an en moyenne.
Heureusement, la mortalité liée au cancer du sein a connu une diminution de 1,6 % par an entre 2010 et 2018. Cette baisse est en grande partie attribuable aux avancées dans les traitements et à l’amélioration des diagnostics précoces, notamment grâce au dépistage organisé. Néanmoins, le cancer du sein reste la principale cause de décès par cancer chez les femmes. Toutefois, lorsqu’il est détecté tôt, ce cancer a un bon pronostic, avec des taux de guérison atteignant 90 %.
Les Fondements du Dépistage Organisé du Cancer du Sein
Le dépistage a pour objectif de détecter un cancer à un stade précoce chez des personnes qui ne présentent pas encore de symptômes, afin de permettre un traitement plus efficace et d’améliorer les chances de guérison. Plus un cancer du sein est détecté tôt, plus il est facile à traiter, augmentant ainsi les probabilités de guérison.
La survie à 5 ans est de 99 % pour un cancer détecté tôt, contre seulement 26 % pour un cancer diagnostiqué à un stade avancé.
En 2015, une revue approfondie des recherches par un groupe d’experts internationaux du Centre international de recherche sur le cancer (Circ) a confirmé que les bénéfices de la mammographie de dépistage pour réduire la mortalité par cancer du sein surpassent ses éventuels effets secondaires pour les femmes âgées de 50 à 74 ans.
Les études montrent que le dépistage systématique par mammographie pourrait réduire la mortalité par cancer du sein de 15 à 21 %.
Pour garantir un accès équitable à un dépistage de qualité sur tout le territoire, le programme national de dépistage organisé, en place depuis 2004, invite toutes les femmes de 50 à 74 ans à se soumettre à une mammographie tous les deux ans. Ce programme respecte des normes de qualité rigoureuses.
Les mammographies considérées comme normales sont relues par un second radiologue (« double lecture »), ce qui permet de détecter en moyenne plus de 6 % des cancers non identifiés lors de la première lecture.
En termes de participation, plus de 2,5 millions de femmes se soumettent chaque année à ce dépistage organisé, avec un taux de participation d’environ 47,7 % pour les femmes invitées (données 2021-2022). En outre, 10 à 15 % des femmes choisissent de se faire dépister de manière individuelle.
Lors de la période 2017-2018, le dépistage organisé a permis de détecter 40 120 cancers, soit environ 7,6 cancers pour 1 000 femmes dépistées.
Dépistage organisé : les démarches pratiques à suivre
Le programme de dépistage organisé du cancer du sein suit les directives publiées au Journal officiel du 21 décembre 2006. Voici comment il fonctionne :
Tous les deux ans, l’Assurance Maladie envoie une invitation personnalisée aux femmes de 50 à 74 ans. Ce programme cible les femmes asymptomatiques de plus de 50 ans, sans risques particuliers. Les femmes ayant des motifs médicaux personnels qui les rendent non éligibles sont exclues du dépistage.
Les femmes invitées doivent se rendre chez un radiologue agréé, sélectionné parmi une liste fournie dans le courrier d’invitation ou disponible sur le site ameli.fr. L’examen comprend une mammographie (deux clichés par sein, de face et obliques) ainsi qu’un examen clinique des seins. L’Assurance Maladie prend en charge l’examen à 100 %, sans frais à avancer.
Après l’examen initial, chaque mammographie normale est relue par un second radiologue spécialisé. Cette seconde lecture permet de détecter environ 6 % des cancers qui n’ont pas été identifiés lors de la première lecture. Les résultats, accompagnés des clichés, sont envoyés à la patiente dans un délai d’environ 15 jours. Ils peuvent également être communiqués au médecin traitant et/ou au gynécologue si la patiente le souhaite.
En cas d’anomalie, le radiologue réalise immédiatement des examens complémentaires, tels que de nouveaux clichés ou une échographie, afin d’accélérer le diagnostic. Ces examens sont également pris en charge par l’Assurance Maladie selon les conditions habituelles.
À partir de 2024, l’Assurance Maladie enverra aux médecins traitants, via amelipro, une liste de leurs patientes qui n’ont pas encore réalisé le dépistage. Ces informations aideront les médecins à identifier les patientes éligibles et à les encourager à participer au programme.
Évaluation et critères de qualité
Le programme de dépistage organisé du cancer du sein est soumis à une évaluation rigoureuse et à des critères de qualité stricts, définis par un cahier des charges précis.
Ce programme est régulièrement évalué en fonction de divers indicateurs, tels que le taux de participation, la qualité de l’organisation, l’analyse des pratiques, et son efficacité globale.
Pour garantir des résultats fiables, les radiologues participant au programme doivent répondre à des exigences spécifiques : les premiers lecteurs doivent lire au moins 500 mammographies par an, tandis que ceux assurant la seconde lecture doivent en examiner 1 500 supplémentaires chaque année.
Les équipements utilisés sont soumis à des normes strictes. La qualité de la chaîne mammographique est contrôlée deux fois par an par des organismes agréés, conformément aux recommandations de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).
Le programme intègre également les avancées technologiques et médicales après une évaluation minutieuse. Par exemple, l’arrêté du 24 janvier 2008 a permis l’inclusion de la mammographie numérique dans le dépistage organisé. Aujourd’hui, plus de 90 % des mammographies réalisées dans le cadre du programme utilisent cette technologie.
Surveillance spécifique des femmes à haut risque
Les femmes présentant un risque élevé de cancer du sein bénéficient d’une exonération du ticket modérateur pour les examens de dépistage spécifiques recommandés dans leur cas.
Certaines femmes, en raison d’antécédents personnels ou familiaux, sont particulièrement exposées au risque de développer un cancer du sein. Pour ces patientes, la Haute Autorité de santé a établi des protocoles de dépistage adaptés, conformément à la recommandation du 19 mars 2014 intitulée « Dépistage du cancer du sein en France : identification des femmes à haut risque et modalités de dépistage ».
Le décret n° 2016-1185 du 30 août 2015 précise les situations cliniques pour lesquelles les frais liés à certains actes techniques de dépistage du cancer du sein sont intégralement pris en charge, sans participation financière de l’assurée.
Populations visées
Une surveillance spécifique est justifiée dans les quatre situations suivantes :
- Mutation génétique prédisposante : Les personnes ayant des antécédents familiaux de cancer du sein ou de l’ovaire et porteuses d’une mutation génétique prédisposante (comme les mutations BCRA1 ou BCRA2) nécessitent une attention particulière.
- Risque très élevé évalué par un onco-généticien : Les personnes avec des antécédents familiaux de cancer du sein ou de l’ovaire, dont le risque personnel a été évalué comme très élevé par un onco-généticien, justifient une surveillance accrue.
- Risque élevé évalué par un onco-généticien : Une surveillance spécifique est également nécessaire pour celles dont le risque personnel est considéré comme élevé par un onco-généticien, toujours en lien avec des antécédents familiaux.
- Antécédents personnels de lésions précancéreuses : Les personnes ayant un historique d’hyperplasie canalaire atypique, d’hyperplasie lobulaire atypique ou de carcinome lobulaire in situ nécessitent un suivi particulier.
Il est important de noter que ces personnes ne doivent pas être en affection de longue durée (ALD) pour un cancer du sein ou une maladie de Hodgkin, ni en suivi post-ALD après un traitement pour ces maladies.
Un score familial, le score d’Eisinger, est utilisé pour évaluer l’arbre généalogique et déterminer si une consultation en oncogénétique est justifiée.
Pour plus de détails, consultez la fiche « Cancer du sein : quelles modalités de dépistage ? Pour quelles femmes ? » disponible en PDF sur le site de l’Institut national du cancer (INCa).